Une appli pour lutter contre les TMS
5 janvier 2022
- Bretagne
- Unité de Recherche
Les troubles musculo–squelettiques (TMS) sont de plus en plus reconnus dans le monde professionnel. Cette attention a généré un coût croissant pour les entreprises. La prise en charge d’un salarié atteint de TMS peut représenter plusieurs dizaines de milliers d’euros pour l’entreprise. Face à cette situation, les acteurs économiques sont décidés à agir, et à intervenir encore plus tôt auprès de leurs employés. Cela passe par une identification plus efficace des facteurs responsables de TMS, et la mise en place d’actions de prévention.
C’est dans cette optique que le groupe français d’ingénierie et de production d’équipements automobiles, Faurecia, s’est tourné vers l’équipe MimeTIC, du chercheur Franck Multon, formée de membres du laboratoire Mouvement Sport Santé (M2S), de l’Irisa et d’Inria. Le chercheur est spécialiste des sciences du sport. « Je travaille, en particulier, sur la compréhension du mouvement humain. Nous utilisons, notamment, des outils numériques, comme des jumeaux numériques, pour simuler son fonctionnement », explique-t-il. Faurecia veut collaborer avec MimeTIC pour identifier les possibles TMS sur certains postes de travail. « L’industriel souhaitait objectiver et quantifier les risques d’apparition de ce type de troubles », détaille le chercheur.
Mesurer ces risques était jusqu’alors une tâche complexe, qui passait, entre autres, par une estimation du mouvement de l’opérateur. « Sur un poste de travail, la personne n’est pas toujours totalement visible sur une vidéo, des gens circulent devant lui et les champs magnétiques des appareils de mesure sont perturbés », explique Franck Multon. La mission était d’autant plus difficile que les chercheurs souhaitaient développer des instruments de mesure non invasifs, qui ne nécessitent pas un calibrage préalable de l’espace. Les scientifiques profitent alors de l’arrivée sur le marché, en 2012, d’un appareil destiné, à l’origine, au grand public : la Kinect, de Microsoft.
MimeTIC propose à Faurecia d’utiliser cet appareil pour mesurer les mouvements de ses employés, en finançant une thèse Cifre (financement ANRT) pour l’adapter à l’environnement spécifique d’un poste de travail. « Nous avons développé un code fondé sur l’apprentissage machine, pour corriger les erreurs de mesure de la Kinect dans ces conditions difficiles. Ce travail a généré cinq publications scientifiques », souligne Franck Multon. Encouragée par ces bons résultats, l’équipe a décidé de les valoriser à travers la création d’une start-up. La SATT Ouest Valorisation a financé la maturation du projet, en permettant à un ergonome et à deux ingénieurs de mettre au point une technologie particulière. Un logiciel est finalement déposé en 2018 et la start-up Moovency est créée dans la foulée.
Aujourd’hui, Moovency commercialise le logiciel sous le nom de Kimea. L’entreprise est composée d’une quinzaine d’employés. Parmi ses clients, plusieurs grands comptes, dont Faurecia. L’équipe aux manettes de la start-up continue de travailler avec le laboratoire M2S et Inria. L’utilisation de simples caméras au lieu de la Kinect a permis de simplifier l’usage du dispositif. Ce qui pourrait intéresser de nouveaux secteurs. La start-up a commencé à travailler avec plusieurs centres de formation, dans le **BTP **et dans le secteur médical, notamment, pour former les professionnels aux bons gestes et aux bonnes postures.