Des bactéries naturelles pour protéger les huîtres

11 mai 2022

  • Bretagne
  • Unité de Recherche

Les aquaculteurs affrontent des épisodes infectieux de plus en pus fréquents qui déciment leurs élevages. Le Laboratoire de Biotechnologie et Chimie Marines (Université de Bretagne Occidentale/Université de Bretagne du Sud) a, peut-être, trouvé une solution pour mieux protéger les filières ostréicoles et piscicoles.

Tout commence dans l’archipel des Glénan. Au cœur de cet espace classé Natura 2000, donc préservé de toute intervention humaine, les scientifiques du LBCM étudient la faune marine. Au cours de leurs travaux, ils découvrent que certains animaux en bonne santé ont une hémolymphe, l’équivalent du sang chez les invertébrés, non stérile. « À l’époque, la présence et le rôle de ces bactéries dans l’hémolymphe d’animaux sains n’avaient jamais été étudiés », explique Yannick Fleury, co-directeur du laboratoire.

L’équipe se penche alors sur la fonction de ces bactéries dans la défense des invertébrés marins. Les chercheurs s’aperçoivent que certaines bactéries du genre Pseudoalteromonas présentent des activités antibactériennes et antibiofilm notamment contre des bactéries du genre Vibrio, responsables de nombreuses infections dans les élevages aquacoles. En poussant plus loin l’étude, l’équipe du LBCM identifie une nouvelle espèce de Pseudoalteromonas et les structures chimiques originales des composés antibactériens et antibiofilm. Pour explorer leur utilité dans la défense des invertébrés marins, des essais sont menés sur l’ormeau européen, en collaboration avec la société d’élevage France Haliotis. Une réduction significative de la mortalité provoquée par un Vibrio pathogène est observée. La SATT Ouest Valorisation accompagne alors l’équipe dans le dépôt de brevets, et des travaux s’engagent pour développer les premières applications. « Nous avons étudié deux types d’usages : la lutte contre la multirésistance aux antibiotiques et l’utilisation de probiotiques pour les élevages », indique Yannick Fleury.

Le laboratoire poursuit ce dernier objectif depuis 2020 avec le lancement du projet PAQMAN financé par le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche. L’objectif est de tester plusieurs de ces bactéries Pseudoalteromonas sur différents types d’élevages, huîtres plates comme bars européens, et de mesurer le taux de croissance et de survie des animaux face à des agents infectieux. Le projet est réalisé avec plusieurs partenaires, dont l’Anses (l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), le Comité régional de la conchyliculture CRC Bretagne Nord et l’entreprise Seanova. Les premiers résultats sont positifs. « L’utilisation de ces souches réduit significativement la formation de biofilm dans les bassins d’élevages. Une amélioration de la survie de 25 % est observée chez le bar européen soumis à une infection par Vibrio », souligne Yannick Fleury.